1Le Journal d’une femme de chambre de Mirbeau nous propose une vision proliférante, débordante de la sexualité, qui semble animer tous et chacun. Pierre Michel, notamment, rappelle que Mirbeau se plaît à problématiser ce rapport dans le roman16, faisant à certains moments de Célestine son porte-parole, en lui prêtant ses propres réflexions, pour ensuite s’en distancier manifestement, la privant même parfois de toute crédibilité. Il reprend la dimension sulfureuse du cas limite proposé par Mirbeau ; mais tandis que ce dernier discrédite très rapidement l’approche moraliste, Buñuel érige Célestine en instance morale, la valorise et lui donne un certain crédit. 97 min. Journal d'une femme de chambre Full Movie HD 1080p. Notons enfin qu’alors que dans le roman, le Capitaine se contente de se réjouir de la mort de Rose, dans le film, il la renvoie carrément : l’arrivée de Célestine le conduit manifestement à vouloir regagner sa virilité, en se débarrassant de la présence maternelle et castratrice de Rose. While Mirbeau essentially sees sexuality as a deadly strength, which is omnipresent and very powerful, Buñuel, on the contrary, presents a network of perversions which no longer fulfils its regenerating function. 13 Rappelons pour mémoire que Freud définit la perversion comme une « déviation de l’instinct ou de la pulsion sexuelle », « quand l’orgasme est obtenu avec d’autres objets sexuels, ou par d’autres zones corporelles ». Sa démonstration s’appuie sur le questionnement des notions de perversion et de déviance : si la mise en opposition d’un discours stéréotypé et normatif d’une part, et d’une réalité mouvante et instable de l’autre, n’exclut pas la possibilité d’une volonté morale sincère, elle met cependant violemment en avant son inadéquation à la réalité, et donc son inefficacité. Tandis que dans le livre, Madame se contente de déclarer qu’elle « n’aime pas qu’on se mette des parfums », chez Buñuel, elle va expliquer qu’il n’est, selon elle, pas « convenable » que les « femmes se parfument », avant d’ajouter « et à plus forte raison les domestiques ». Ce sont finalement des reproches opposés qu’adressent Mirbeau et Buñuel aux sociétés qu’ils dépeignent : alors que Mirbeau voit dans Éros un vassal de Thanatos, et fait le portrait d’une prolifération bicéphale, Buñuel décrit une société qui bride Éros, et l’empêche de promouvoir ses forces vitales. HIMY-PIÉRI, Laure (dir.) A scheming servant works for a wealthy couple in France during the late 19th century. La seule sexualité palpable est celle, perverse, de Joseph, sur laquelle on reviendra en détail. Il existe, au cinéma, plusieurs de ces journaux homonymes : un Russe muet, un Franco-Américain et un Hispano-Français. 23L’affaire de la petite Claire va surtout être le moyen pour Buñuel de mettre en scène un réseau de complicités et de correspondances, qui dresse un portrait cohérent de la société préfasciste. Le Journal d’une femme de chambre (sh. Himy-Piéri, Laure, et Gérard Poulouin, ed. Une descente dans l’intérieur bourgeois qui s’accomplit jusque dans les crânes. 17 M. Oms, Don Luis Buñuel, Paris, Cerf (Septième Art), 1985. France/Italy. 19On voit souvent en Buñuel le grand apologue des perversions, dont il propose, au fil de son œuvre, un catalogue réjoui. Cette castration est annoncée dès le début du film : Rabour envoie son gendre se raser, l’infantilisant et le dévirilisant. 21 Celui-ci était préfet de la ville de Paris, en 1928, et autorisa les ligues d’extrême droite à saccager la représentation de L’Âge d’Or, second film de Buñuel et brûlot surréaliste. Deleuze y voit des marques d’un monde originaire, « préalable à toute différenciation de l’homme et de l’animal ». Moviepilot. 21Outre les partis pris esthétiques, cette différence de stratégie s’explique aussi par une divergence idéologique fondamentale : Pierre Michel souligne, dans Les Combats d’Octave Mirbeau, que chez l’écrivain, le plaisir est mortifère, le sexe une drogue, et l’amour un piège. Dans les deux cas, on nous montre des personnages que leur rapport au sexe rend grotesques : au-delà des positionnements politiques, c’est dans une certaine misanthropie que les deux auteurs se retrouvent. Buñuel se prend à exécuter des mouvements virtuoses – la mort du patriarche sur son lit, les bottines sous le nez – pour accompagner la progression liquide des pulsions qui, en un sens, envahissent l’espace. De nombreux autres enregistrements sont disponibles sur www.audiocite.net Vous pouvez participer à ce projet et nous aider de nombreuses autres manières: Dnevnik jedne sobarice) je francusko-italijanski film snimljen 1964. godine u režiji Luisa Buñuela.Predstavlja drugu po redu adaptaciju istoimenog romana Octavea Mirbeaua. Read about Journal d'une femme de chambre (Chapitre Viii) from Karin Viard's Octave Mirbeau : Le journal d'une femme de chambre (Lu par Karin Viard) and see the artwork, lyrics and similar artists. Download Journal d'une femme de chambre (2015) Full Movie. Célestine raconte la servitude, la mascarade humaine, la capitale et ses places ingrates, son arrivée chez un couple normand, elle acariâtre, lui lourdaud, risibles. With Jeanne Moreau, Georges Géret, Michel Piccoli. par Mathieu Macheret Premier des sept films de la période française de Buñuel, Le Journal d’une femme de chambre (1963) est réputé le moins énigmatique d’entre eux. Genre/Form: French fiction Fiction: Additional Physical Format: Online version: Mirbeau, Octave, 1850-1917. Il s’interroge sur le jugement, répandu dans la critique de l’époque, faisant du film une édulcoration du roman de Mirbeau. Read "Le journal d'une femme de chambre Analyse complète de l'œuvre" by Sophie Lecomte available from Rakuten Kobo. Narrated by: Élise Pierre. In: Stone, Rob and Gutiérrez Albilla, Julián Daniel eds. Alors que dans le roman, Claire n’apparaît que sous forme de cadavre, et même de ragot – Rose raconte à Célestine qu’on a trouvé un corps –, Buñuel, au contraire, fait de la petite fille un personnage à part entière du Prieuré, dont les domestiques, aussi bien que les maîtres aiment s’occuper. 25Loin de voir son rôle diminué, la sexualité continue à s’imposer de manière centrale et prédominante dans l’adaptation de Buñuel. Le journal d'une femme de chambre (Diary of a Chambermaid). Quality : 320kbps. Paroi opaque, faciès indéchiffrable, véritable hors-champ se baladant dans le champ, elle conserve une attitude mystérieuse où l’on ne lit rien d’autre qu’une pointe d’effronterie, un zeste de caprice. Les jours passèrent (0:25) 13. Joseph, quant à lui, veut faire proliférer ses conceptions, liant amour, sexualité, et violence : lorsque Célestine le traite de salaud, Joseph l’agrippe violemment, tout en lui affirmant qu’elle est « belle ». livre audio en français - le journal d'une femme de chambre chapitre 2- Octave Mirbeau - Duration: 39:44. Monsieur Monteil incarne cette stérilité bourgeoise, signe d’un monde condamné : il passe son temps à tenter d’obtenir les faveurs des femmes qui l’entourent, sans jamais y parvenir. Si Mirbeau et Buñuel ont des ennemis communs, et s’attaquent avec autant de vigueur à l’Église, à la Justice et aux groupes réactionnaires, ils procèdent selon une dynamique inverse : tandis que Mirbeau procède par élargissement et accumulation, et tisse son réseau de sens à travers la glose de sa narratrice, Buñuel s’appuie au contraire sur un resserrement et sur une description volontairement abrupte. Buñuel, au contraire, isole au maximum le milieu qu’il décrit : le Prieuré est séparé du reste du monde par la longue route que Célestine et Joseph parcourent lors de la séquence d’ouverture, ou encore par la forêt de Raillon, dans laquelle ont lieu le viol et le meurtre. Select Your Cookie Preferences. Le flashback du bar (0:35) 9. C - 13013 Marseille FranceVous pouvez également nous indiquer à l'aide du formulaire suivant les coordonnées de votre institution ou de votre bibliothèque afin que nous les contactions pour leur suggérer l’achat de ce livre. La femme de chambre de Mirbeau est avant tout un être sensuel. Parce qu’à la fois individu et figure fantasmatique, la bonne se prête particulièrement bien à la projection. Une première version a été publiée en feuilleton dans L'Écho de Paris, du 20 octobre 1891 au 26 avril 18921, alors que le romancier traverse une grave crise morale et littéraire et néglige de peaufiner ses feuilletons pour les publier en volume. The Diary of a Chambermaid may refer to: . 1Le Journal d’une femme de chambre de Mirbeau nous propose une vision proliférante, débordante de la sexualité, qui semble animer tous et chacun. 1:55:50. L’heure de la promenade (2:12) 7. 1. Il cite même, dans la dernière scène du Journal, le préfet qui fut à l’origine de cette interdiction, dont le nom « Chiappe » est scandé par les factions de l’Action Française défilant dans les rues du Havre. 14On trouve dans le film de Buñuel deux exemples de perversion, au sens le plus strict du terme13. C’est par ce discours moral et normatif que Joseph est d’abord accusé : avant même que Célestine n’ait formulé une seule fois ses soupçons à son encontre, elle emploie le terme de « salaud » pour désigner le coupable, le même que celui qu’elle avait utilisé un peu plus tôt pour l’insulter. Les pulsions qui parcourent violemment le monde clos du Prieuré sont stériles, et amènent celui-ci à fonctionner sur un mode cyclique, fondé sur la répétition et le retournement. Point d’entrée idéal dans l’œuvre du cinéaste, il détient pourtant une énigme de taille, proprement insoluble : l’impénétrable Célestine, personnage de petite bonne d’une ambiguïté complète, magistralement interprété par Jeanne Moreau. 1:19:18. Il use, à ce titre, de toute la largeur d’un splendide Scope noir et blanc, autant pour tenir à distance ses personnages – distance à la fois sociale et pulsionnelle – que pour mieux serpenter à travers les couloirs, parfois même à travers les cloisons. We use cookies and similar tools to enhance your shopping experience, to provide our services, understand how customers use our services so we can make improvements, and display ads. À la différence de Renoir, Buñuel ne fait pas sienne la problématique de la lutte des classes, inscrite en germe dans le récit. (Eds.) Alors que Mirbeau voit essentiellement dans la sexualité une force mortifère, omniprésente et très puissante, Buñuel met au contraire en scène un réseau de perversions ne remplissant plus sa fonction de régénération. Le monde dans lequel Célestine pénètre est donc marqué par un manque d’adéquation entre les pulsions et leurs objets, et de ce fait par une forme de stérilité mortifère. Free kindle book and epub digitized and proofread by Project Gutenberg. Le journal d'une femme de chambre: Analyse complète de l'oeuvre (French Edition) eBook: Lecomte, Sophie, fichesdelecture.com,: Amazon.com.au: Kindle Store Toute la perception de cet organisme malade repose sur le personnage de Célestine, clé de voûte du film, et splendide réussite du couple Moreau-Buñuel. Audio codec : MP3. Directed by Luis Buñuel. Celui-ci serait donc annoncé et même exhibé avant d’être réalisé : présenté d’abord sur un mode dialogué, policé, et surtout public, avant d’être filmé métaphoriquement par le biais d’animaux, sur un mode souterrain, il semble intervenir dans toutes les dimensions de la société. Vérifiez si votre institution a déjà acquis ce livre : authentifiez-vous à OpenEdition Freemium for Books. A la gare (0:59) 3. Joseph (0:39) 11. Gallery of 27 movie poster and cover images for Le journal d'une femme de chambre (1964). Un seul mot, sublime, nous donne pour un instant seulement accès à ses pensées, à un grain d’intériorité. Le journal d'une femme de chambre by Octave Mirbeau, 1984, Gallimard edition, in French / français De même, on peut se demander dans quelle mesure Buñuel adhère réellement aux propos de Célestine, et à sa lutte contre Joseph. 10Fidèle en cela aux conceptions mirbelliennes, Buñuel fait fonctionner à plein les pulsions sexuelles comme moteur. Il est intéressant de constater que cet étouffement est lié au fait que le sexe n’y joue manifestement plus sa fonction régénératrice. Journal d'une femme de chambre. Mirbeau fait de Joseph une image satanique, à la fois miroir effrayant et exutoire cathartique de la société qui l’a produit : il le dote d’un statut particulier, qui justifie l’attirance irrationnelle de Célestine. En se reparfumant, Célestine s’affirme comme femme, et peut ainsi prendre le pouvoir. La sexualité, qui structure les interactions, fonctionne à la fois comme pulsion irrationnelle et comme arme maîtrisée. Il analyse la notion de perversion comme une construction, historiquement datée (autrement dit, en totale contradiction avec la définition freudienne). Buñuel met en scène une économie différente, basée sur une opposition entre pôles stériles et fertiles. Là encore, l’enjeu est symbolique, et la lutte prendra la forme de renversements successifs : Célestine pensera un moment l’avoir emporté et avoir fait triompher ses convictions au prix d’un mariage, mais il ne s’agit que d’une victoire provisoire, puisque c’est sur la montée des idées de Joseph que se termine le film. 7Enfin, Madame, frigide, vit dans le refoulement. Toujours contrarié ou dévalué, ramené à des considérations sanitaires ou financières, utilisé, refoulé, il est privé de son rôle moteur. Le personnage de Monteil fonctionne comme un pôle de dispersion : ses pulsions s’annulent parce qu’elles ne rencontrent pas d’objet. Buñuel, bien qu’il reprenne la confrontation au tribunal entre le Capitaine et Monteil, centre sa représentation de la société et sa mise en accusation sur la question du meurtre de Claire. Tous ont été tirés du même et fameux roman d’Octave Mirbeau, publié en 1900. Le Journal d’une femme de chambre est un roman français d'Octave Mirbeau, paru chez Charpentier-Fasquelle en juillet 1900. Célestine (2:17) 6. Enfin, le garde-chasse, qui collectionne les pulsions de mort : fascisme, racisme, antisémitisme et, pour couronner le tout, pédophilie. Ainsi, les Monteil dévaluent la sexualité : Madame la ramène à des considérations financières (elle répète à plusieurs reprises qu’elle ne veut pas que les aventures de son mari lui coûtent de l’argent) ; Monsieur, pour sa part, la rattache à des problématiques sanitaires, évoquant les différentes maladies que Célestine a probablement contractées. Journal d’une femme de chambre (0:45) 5. Spectral cinema: Le journal d’une femme de chambre. LE JOURNAL D'UNE FEMME DE CHAMBRE. La vie en société ne faisant qu’aggraver ces tendances, l’amour est finalement à l’origine de la plupart des tragédies humaines. Cette fièvre pulsionnelle aboutit au viol et au meurtre d’une petite fille, dont on retrouve un matin le cadavre au coin d’un bois. Marcel Oms17 note avec justesse que Célestine est à la France de 1930 ce que Viridiana est à l’Espagne de 1961 : non seulement les deux héroïnes finissent par accepter la situation qu’elles ont voulu combattre, mais elles vont aussi l’exploiter à leur profit personnel. Là où Mirbeau exclut a priori toute prise de position morale désintéressée, Buñuel nous montre longuement les impasses, et surtout les ambiguïtés de celle-ci. Voilà ce qui ressort de la boîte, quand on la secoue un peu. La frigidité de la maîtresse de maison, grenouille de bénitier, qui n’hésite pas à demander conseil à son curé sur les caresses qui pourraient convenir à son mari. Célestine narra en primeira persoa algúns dos acontecementos da súa vida de empregada como camareira ou criada. Alors que la femme de chambre de Mirbeau traverse toutes les strates de la société qu’elle décrit, celle de Buñuel ne nous montre qu’un seul milieu, le plus étriqué et le plus enfermé possible. Il construit le portrait d’un personnage totalement maîtrisé, d’une grande lucidité et d’une grande cohérence ; cependant, il réintroduit, au sein même de ce portrait, une dose d’incontrôlé, voire d’inconscient. 6 Renoir développe jusqu’à l’outrance cet aspect : non seulement Rose appelle le Capitaine « Bébé », mais elle s’autodéfinit aussi comme sa « Maman ». Si on entend les couinements du canard, rien ne sera montré : on verra successivement le plumage en très gros plan, le corps de Joseph qui dissimule le canard, puis Célestine qui tente d’intervenir. Après l’arrestation du coupable, à qui elle s’est offerte afin de dénicher une preuve à charge, elle s’assied à table, un dé à coudre au doigt et fait mine d’écrire sur le bois. It questions the judgement, widely held among the critics of the time, that the movie is a sweetened version of Mirbeau’s novel. La vie me reprit / La brosse (2:25) 8. Célestine, femme de chambre, arrive dans une nouvelle place. 10 On retrouve la configuration mise à jour par Alexandra Gruzinska dans « Humiliation, vengeance et haine : le rire de Célestine », Cahiers Octave Mirbeau, 4, 1997 : Célestine utilise dans son journal le verbe, et plus particulièrement le rire moqueur, comme outil d’une vengeance. Qu’il s’agisse des scènes où Monsieur lui court après, ou de celles où le Capitaine lui fait des avances, Célestine semble avant tout amusée : elle observe avec une certaine forme de bienveillance le désir masculin dont elle est l’objet. Les pulsions se manifestent alors sur un mode soit dévalué (Monteil qui reprend le leitmotiv surréaliste de « l’amour fou » en l’appliquant à n’importe laquelle de ses bonnes), soit dangereux, à travers la violence politique de Joseph et de ses clones, qui défilent au cri de « Vive Chiappe ! Le personnage de Buñuel n’est pas frigide pour autant, et ne se contente pas d’être objet ou support : elle va au contraire se présenter comme une force de resexualisation, promotrice de l’élan vital que Buñuel associe à la sexualité. Himy-Piéri, L., & Poulouin, G. Elle n’épargne surtout pas Célestine, qui malgré son positionnement de témoin, n’échappe pas à la dépravation et à la contagion des perversions qu’elle observe. Elle se heurte d’abord à l’indifférence de la police, quand elle se rend au poste, puis à son incompétence, une fois qu’elle leur a livré Joseph.
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